Qui êtes-vous ?

Ma photo
"Il ne faut pas juger les gens sur leurs fréquentations. Juda avait des amis irréprochables." VERLAINE*

mardi 31 juillet 2012

Holy Motors




Ce film là, je l'attendais. Pour comprendre pourquoi il n'avait rien obtenu à Cannes, car il me semblait que tout, dans ce film, était fait pour ce festival.  Et puis, avec mon obsession de l'image parfaite, si parfaite qu'elle évince l'histoire, que le scénario n'a plus vraiment d'importance, il me semblait que j'allai être servie avec Holy Motors. Et effectivement. 

En fait, il y a une histoire. M. Oscar est quelqu'un qui se déguise pour le compte d'une agence. Il entre dans sa limousine blanche, lit le dossier qui lui est confié, se déguise en conséquence et sort jouer son rôle pendant quelques heures. Puis il retourne dans la limousine, et se déguise pour le dossier suivant... et ainsi de suite sans fin, jamais. 

Selon certains de mes amis qui ont vu ce film avec moi, le rôle de M. Oscar (et de ses collègues, car il est loin d'être seul) est d'apporter de l'absurdité au monde. Pour moi, je n'ai pas cherché de raison à ce métier. Je me suis tout d'abord dis que ce film parlait des acteurs, du métier d'acteur. Un acteur joue en permanence un autre rôle et n'est jamais lui-même. Et à l'instar de la vie tragique de M. Oscar, la vie d'acteur m'a alors semblé désespérée et vide de sens. 
Mais après, l'évidence est apparue... c'est notre vie qui peut être vide de sens. Ne jouons-nous pas nous-même un rôle ? Et ne pouvons-nous pas être joué ? Il suffirait de connaître notre passé et nos proches... et n'importe qui pourrait nous remplacer. 

Revenons au film. Outre le message (pour moi) extrêmement pessimiste qu'il transmet, il est habité d'une très jolie poésie, d'un bon et fin sens de l'humour, de grands moments de joie aussi, et surtout de personnages fabuleux. Fabuleux de fables (j'ai toujours trouvé ce genre de jeux de mot pédant à l'écrit). L'utilisation de la musique et surtout du silence est excellente, et l'esthétique, bien que pour moi pas assez poussée, est sombre et étrange. 

Deux petits bémols cependant : Kylie Minog a un jeu plat et décevant ; les dialogues sont un peu prévisibles. 

Je ne sais toujours pas pourquoi Holy Motors n'a rien obtenu à Cannes. 

Ce film est cependant à voir, vraiment. Vraiment. 

mardi 17 juillet 2012

La pensée, en constante évolution, peu produire les pires énormités, ou de très bonnes réflexions.

Il me semble qu'il est beaucoup plus facile de savoir pourquoi on fait de la musique, et pourquoi on veut en faire, que pourquoi on veut faire du cinéma et du théâtre. Il faut dire que j'ai une pratique musicale plus importante... et finalement ce n'est peut-être qu'au bout d'un certain nombre d'année qu'on comprend pourquoi on a des passions.

Oui, et peut-être que c'est ce qui définit le mieux la passion. Ne dit-on pas de l'amour qu'il a ses raisons que la raison ne connaît pas ? Eh bien, j'aime le théâtre et le cinéma pour des raisons inconnue de la raison. La raison, par ailleurs, n'a rien à voir la dedans. La raison c'est ce qu'on donne à l'extérieur, pour faire semblant, pour faire comme si on maîtrisait ses rêves et ses envies.

Pourquoi voudrait-on faire du cinéma ? Ce n'est pas comme la peinture, la sculpture, l'écriture - autant de moyens d'expressions, d'extérioriser tout ce qui est à l'intérieur de nous et qui bouillonne. Mais le théâtre et le cinéma, c'est pas tout seul. On travaille avec des gens. On travaille oui, au meilleur sens du terme. Mais on se valorise aussi. Le cinéma est un art à la mode - dire "je fais du cinéma", aujourd'hui, est bien plus valorisant que "je suis écrivain" ou "je fais du théâtre". C'est fini ça, c'est passé, on a déjà tout vu et revu. Je persiste et signerai toujours : non, on a pas tout vu. Si l'écriture est en passe de ne devenir qu'une bouillie commerciale (en Europe du moins), le théâtre a encore, et pour toujours, énormément de choses à nous dire. Et le cinéma, j'en parle pas. Le cinéma c'est merveilleux parce que ça peut tout être, dans les extrêmes les plus délirants. Et en même temps c'est l'un des arts les plus contraignants au niveau du fric. 

Quand j'entends Alexandre Astier dire qu'il "ne parle pas boulot en dehors du boulot", ça me choque. Si je faisais du cinéma, je ne pourrai penser à rien d'autre ou presque. Ce ne serait pas une contrainte, ça serait la recherche permanente, effrayante, de ce qui va toucher, ébranler, faire changer des gens. Les gens, en voilà une drôle d'espèce... tantôt je l'aime, tantôt je la hais, cette masse de congénères, cette masse d'individuels. Qu'ils m'intriguent... qu'ils me fascinent... et comme j'aimerai leur montrer, à ceux qui disent qu'ils "ne sont pas artistes" avec un haussement d'épaule déçu (je la vois leur honte, ils ont honte de n'avoir pas su sentir, de n'avoir pas su voir, alors que tout le monde peu) - j'aimerai leur montrer ce que moi je vois, ce que d'autres ont vu, et j'aimerai qu'ils comprennent. 

samedi 14 juillet 2012

" Ainsi donc les avalanches se font quelquefois au moyen d'un caillou gros comme le bout du doigt."


Ce que j'adore, c'est que plus j'avance dans l'art (noble voie), plus j'ai de révélations. Ca fait maintenant deux ans que les électrochocs se succèdent, parfois avec quelques mois d'intervalles, parfois seulement une semaine, parfois quelques heures ! Lire Peter Brook  puis voir Lorenzaccio... mise en scène de la Comédie Française par Franco Zeffirelli. Avec, ô révélation doucereuse et fantastique, Francis Huster dans le rôle le plus incompréhensible (avec Don Juan) du théâtre français. Je dis incompréhensible parce que cette pièce fait partie du lot "à voir avant de lire mais à connaître avant de voir". Parce que cette pièce est complexe, riche, et que cette mise en scène (malgré quelques côtés un peu vieillots) met parfaitement en valeur tous les aspects de cet incroyable récit. D'autres en parlerons mieux que moi, et j'attendrai mon niveau bac+5 (et encore) pour analyser vraiment.




En fait je voulais parler des révélations. Chacune d'elle aboutit à l'ajout d'un maître, ou d'une direction. Il y a les vieux maîtres, ceux qui datent de l'enfance et sont simplement un héritage. Et puis il y a les nouveaux. Qui peuvent rester longtemps ou n'être qu'une passade. Sfar (on l'aura compris) est un maître. Comme Astier, comme Anderson, comme Baudelaire et comme Cyrano (celui qui est imaginaire). En revanche, Gainsbourg n'est pas un maître. C'est un frère imaginaire, un double, un diable, l'amour, l'orgueil et l'angoisse. 

Alors que Sfar c'est vraiment une personne qui m'en apprend chaque jour un peu plus. Brook est en passe d'en devenir un aussi, même si je ne connais encore pas bien son travail - quand je le lis en tout cas, j'ai l'impression que ma pensée s'accélère, que mon point de vue sur le théâtre évolue deux fois plus vite. C'est fantastique, c'est comme quand on est enfant, qu'on se demande comment fonctionne l'univers. Un jour on ouvre Le monde de Sophie et en un bouquin, notre pensée a poursuivit deux mille ans de réflexions. 

Finalement j'arrive pas à écrire sur les révélations. Y a peut-être pas tellement de choses à dire (on m'a appris qu'il ne fallait pas écrire "dire"), à part que c'est merveilleux. Qu'il m'en reste encore tellement à ressentir. Oui, tout ce qu'on pourrait écrire à propos des révélations, c'est à quel point c'est fantastique, cette sensation de choc, d'émotion profonde. L'envie qu'on a d'en parler à tout le monde, de leur crier " Mais regardez comme c'est formidable !" Et puis finalement le désir jaloux de la garder pour soi, de l'afficher dans son cerveau à côté des autres, et de pouvoir, bien tranquillement, quand on a rien d'autre à faire que penser, la regarder, la contempler, cette révélation qui nous a tant apporté. 

Et comme je ne manque pas d'orgueil, j'espère un jour provoquer des révélations. Ca serait chouette, super chouette. 

Mais en écrivant d'aussi gros pâtés désordonnés, je sais pas si ça va être possible. 


dimanche 8 juillet 2012

Un fil à la patte.

Hier soir, enfin ! Je me rendais au théâtre éphémère de la Comédie Française pour y voir le fameux vaudeville de Feydeau, dont j'avais tellement entendu parlé, notamment au Masque et la Plume où, quand ils s'y mettent, les critiques ne tarissent plus d'éloge pour la pièce, celle qu'ils ont élu "meilleure de l'année". 

J'adore le théâtre éphémère, j'adore la Comédie Française et ses comédiens, par contre Feydeau, j'adore moins. Alors voilà, c'était drôle, pleins de rebondissements, avec un jeu excellent - on était au théâtre, au "vrai" théâtre, celui de l'imaginaire collectif (je viens d'associer vrai et imaginaire et ainsi de nombreuses et stupides réflexions philosophiques viennent peupler mon esprit). C'est pourquoi j'ai eu l'impression que cette pièce aurait pu être jouée à l'identique ou presque il y a soixante-dix-ans. Et ça m'a déçue. 

Aujourd'hui le théâtre, même à la Comédie Française et peut-être surtout à la Comédie Française, pourrait se permettre d'aller chercher un peu plus loin. Pour Amphitryon, par exemple, sans aller dans l'expérimentation, le metteur en scène Jacques Vincey s'est amusé avec un décor machiné moderne et des costumes extravagants qui renouvelaient la pièce.


Mais dans Un fil à la patte, les costumes et les décors sont d'époque (oui, enfin presque). Le rideau s'ouvre, se ferme entre chaque acte. Les gags se suivent et se ressemblent. A un seul moment, et par le seul comédien (dont je deviens fan, il est aussi magnifique dans Amphitryon : Christian Hecq, le clerc ci-dessus et récompensé d'un Molière pour son rôle dans cette pièce) ayant ajouté du grotesque et du drôle à son personnage, le théâtre est mis en abîme, et la scène se retrouve brusquement en contact avec le public. Mais c'est tout ! Et ça m'a déçue. 


Peut-être que j'en demande beaucoup, mais il me semble qu'aujourd'hui on peut faire bien plus et bien mieux au théâtre, après toutes ces années. Quand je lis Peter Brook et puis que je regarde cette pièce, j'ai l'impression que rien a été fait. En forçant un peu le trait, c'est comme lire du Camus et du Sartre... et puis lire un Marc Levy : on se dit que tout ça n'a servi à rien.

Peut-être aussi que je ne vais pas au bon endroit pour ce que je recherche. Et puis, le divertissement n'est-il pas aussi une mission du théâtre et du roman ? Sans doute; je crois cependant qu'il n'y a pas que cela, et que si on croit au théâtre, on ne peut pas se contenter du vaudeville respecté à la lettre. 

Ca ne m'empêchera pas de retourner dans les salles de la Comédie Française à la rentrée car pour rien au monde je ne manquerai Antigone, Dom Juan et surtout, surtout, Cyrano de Bergerac.